Jacques Brodeur en compagnie de Diane Savard

Jacques Brodeur : Un grand pédagogue nous quitte

La COVID-19 a emporté, en décembre 2020, mon ami Jacques Brodeur. Ceux qui ont connu Jacques se rappellent son énergie, sa fougue, sa passion à défendre les causes qui lui tenaient à cœur. Son hyperactivité en faisait un travailleur acharné qui ne comptait pas ses heures. Il était intègre et sincère et s’il pouvait être déstabilisant, voire dérangeant pour certains, il ouvrait le chemin pour les autres. Jacques était avant tout un enseignant. L’éducation physique lui a permis de constater que la compétition n’est pas la bonne méthode pour développer l’esprit sportif et très tôt il s’est intéressé aux jeux coopératifs qui développent plutôt l’esprit d’équipe et la solidarité.

Cette solidarité il l’a retrouvée en s’impliquant au niveau de son syndicat dans la région de Québec. Jacques mettait toujours en action ses principes et avec lui de l’action il y en avait! Je l’ai connu vers 1986 car, avec l’année de la paix, le collectif Pacijou voyait le jour. Avec Robert Cadotte, Colette Noël, Solange Vincent, Diane Savard, Michel Desjardins, Richard Gendron et quelques amis, nous formions une belle équipe. Notre but : faire réfléchir sur les stéréotypes guerriers, sexistes et racistes des jeux et jouets offerts aux enfants. Notre travail a donné le jour à plusieurs publications et à deux sculptures réalisées avec des jouets guerriers donnés par les enfants des écoles des grandes régions de Montréal et de Québec. Nous avons organisé des colloques, publié sur la publicité aux enfants et sur l’impact de la télévision dans leur vie.

C’est ce créneau que Jacques a investi avec TROP et Édupax par la suite. Il a développé le défi : 10 jours sans écrans pour voir autrement qui est destiné aux écoles. Le concept si bien réussi qu’il a traversé les frontières. Jacques donnait le défi aux enfants, à leurs parents et enseignants de trouver des alternatives aux écrans (télévision, jeux vidéos, tablettes, téléphones, ordinateurs, etc.) qui font d’eux des esclaves, pour retrouver la liberté de converser en famille ou entre amis, faire du sport et redécouvrir la nature. Le charisme de Jacques ainsi que son humour et ses convictions ont réussi à faire de ces défis de grands succès tant en Europe qu’en Amérique. Avec Édupax, Jacques Brodeur a développé des concepts pédagogiques et une didactique toute personnelle. Il a organisé des colloques sur la dépendance aux écrans qui ont réuni des experts du monde entier et son esprit rassembleur a mis en contact les forces vives du domaine. Il aurait souhaité que son œuvre lui survive.

Il fut conseiller à la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) de 1998 à 2000 et, à ce titre, il a animé le réseau des Établissements Verts Brundtland dont la mission d’éducation est de travailler à la réalisation d’un monde plus écologique, pacifique, solidaire et démocratique. Nous avons pu continuer à y travailler ensemble, un autre bon moyen de mettre nos valeurs communes en action. Jacques aimait le travail d’équipe, mais c’était avant tout un leader.

En novembre 2020 il donnait deux ateliers au colloque de l’AQPERE : L’éducation en transition! - Choisir aujourd’hui ce que sera demain. Jacques était en bonne forme physique et la COVID-19 nous enlève un homme charmant, plein d’énergie qui avait encore beaucoup d’amour à donner. On ne peut décrire un homme en quelques lignes ni réduire un être vivant à ses actions et réalisations. Il a été un mentor pour moi, un collègue, mais surtout un ami. Un homme intègre et entier, un grand pédagogue qui laissera sa trace dans le monde de l’éducation. Nous offrons nos sincères condoléances à ses enfants et petits enfants et à tous ses collègues qui continueront son travail d’éducation.

Un texte de Martine Chatelain
Martine Chatelain est une retraitée de l'enseignement. Elle est aussi conférencière et consultante en éducation relative à l’environnement et à la citoyenneté, membre du comité des retraités Bruntland de la CSQ et autrice de La nature et moi de la Fondation Monique-Fitz-Back.